Diagnostic

Ce diagnostic se divise en trois parties. D’abord une approche fondamentale de ce qu’est l’économie en anthropologie, puis les déviations qui ont abouti à l’impasse actuelle et enfin les pistes de solutions.

I L’économie en anthropologie

Tout groupe d’êtres humains a au départ une raison d’être et organise dans ce but les apports de chacun et rend complémentaires les différentes énergies individuelles. Cette organisation a été improprement appelée troc en supposant une simultanéité du don et du contre-don qui n’a jamais été systématique. Le don et le contre-don existent dès la création du groupe (couple, association ou tribu) mais ils ne sont que très rarement simultanés. L’anthropologue et professeur au Collège de France Marcel Mauss a parfaitement expliqué que le don entraînait le contre-don et que le « donner-recevoir-rendre » était au service du lien social et qu’il le nourrissait.  Mauss a développé que le don et le contre-don était ce qu’il a appelé un « fait social total » à dimensions culturelle, économique, religieuse, symbolique et juridique et qu’il ne pouvait être réduit à l’une ou à l’autre de ses dimensions. Mais quand la taille du groupe devient importante, la détection des profiteurs et des tire-au-flanc devient difficile et rend obligatoire la simultanéité du contre-don. L’origine de la monnaie est cette invention du contre-don simultané. La monnaie est donc culturelle, économique, religieuse, symbolique et juridique. Par sa facilité d’usage la monnaie est devenue le regard que le groupe utilise pour isoler les richesses échangées contre de la monnaie dans le fatras des productions. C’est parce qu’une production trouve acheteur qu’elle est reconnue comme richesse et non comme embarras ou déchet. Toutes les fonctions de la monnaie décrites depuis l’antiquité, réserve de valeur, unité de compte et intermédiaire des échanges, découlent toutes de ce que la monnaie est l’étalon culturel de la richesse. C’est l’énergie du groupe, l’énergie sociale, quand le travail est l’énergie individuelle. La monnaie est reconnaissance par le groupe de l’utilité du travail individuel. Toutes les querelles autour de la monnaie viennent de la difficulté à marier la notion de richesse qui est un regard dynamique essentiel au lien social avec la notion d’étalonnage qui est arithmétique et avec la notion de culture qui est sociologique. Toutes les incompréhensions viennent de simplifications excessives et contradictoires.

II Les déviations

Le XXe siècle, sous impulsion anglo-saxonne commerçante, a fait croire par une fabrication erratique de contre-dons que l’augmentation de la production était une augmentation de richesse, et par une très belle illusion qu’une dépense était une richesse et que l’augmentation des échanges commerciaux était aussi une augmentation de la richesse du groupe. Tout a été fait pour que l’on croie à ces deux erreurs, à commencer par la diffusion de l’idée que ces augmentations de richesses permettaient de moins travailler, ce qui a beaucoup plu aux peuples latins. La richesse n’étant qu’un regard, la propagande a remplacé une démonstration inexistante.

Pour faire croire que la croissance du commerce était augmentation de richesse on a additionné tous les échanges dans une zone donnée en appelant finement cette addition d’échanges « gross domestic product » servilement traduit en français par « produit intérieur brut ». En se servant à tout propos de pourcentages du PIB comme d’une ressource ou de son augmentation comme d’une victoire, on a instillé dans les esprits que le commerce était en soi une richesse et que son développement était « la » croissance, alors que le commerce n’est que l’intermédiaire qui se fait payer pour mettre en relation producteurs et consommateurs. A la méthode Coué, d’une dépense on a fait une richesse, d’un emploi on a fait une ressource. Comme cela ne marche évidemment pas, on a nommé ce ratage, la crise, et on a fait de la fuite en avant en cherchant de nouveaux marchés, en inventant la concurrence, l’austérité et le nouvel esclavage dans l’espace qu’est la mondialisation.

Pour faire croire que l’augmentation de la production était augmentation de richesse on a simplement fabriqué du contre-don utilisable à tout moment. Plus on fabriquait de la monnaie plus on laissait croire que les productions étaient des richesses sans que personne ne s’appauvrisse pour reconnaître ces fausses nouvelles richesses. Depuis le début du XXe siècle, par cette inflation dans son vrai sens, par cette fabrication incessante de monnaie, on a sans arrêt dévalué toutes les monnaies par rapport à l’or. Dans les années 70 on a même cassé le thermomètre en déconnectant les monnaies de l’or et l’erreur est devenue encore moins facilement perceptible. N’étant dorénavant liées ni à l’or ni au travail humain utile qu’étaient le don et le contre-don, les monnaies ne sont plus limitées dans leur fabrication et elles se sont donc toutes totalement dévaluées. Aujourd’hui les monnaies ne valent plus rien. Il n’y a que les peuples qui ne le savent pas. On a oublié que la monnaie n’était une énergie que parce qu’elle était contre-don d’un travail utile. Elle était et n’est plus stockage de travail humain. Pour retarder cette prise de conscience on a remplacé la coopération par la concurrence et seul le désir de ne pas mourir le premier empêche une flambée générale des prix. Pour que la fausse monnaie soit utilisée et pour que les productions continuent à être reconnues comme richesses, elle est prêtée à tout va en créant un nouvel esclavage, l’esclavage dans le temps qu’est la dette.

Les acteurs des déviations

Pour arriver à un tel imbroglio il a fallu que plusieurs corps s’agrègent pour que la propagande soit malheureusement convaincante.

Les banques créent la monnaie. Elles ont d’abord détourné le pouvoir régalien de battre monnaie puis l’ont confisqué aux Etats-Unis en 1913 par la création de la FED et en Europe par le traité de Maastricht et le passage à l’euro. Cœur du système, les banques l’ont créé et l’entraîneront dans leur chute. C’est la bête de la mer de l’Apocalypse « Et toute la terre était dans l’admiration derrière la bête » Ap 13,3.

Les medias et leur propriétaire, la publicité, prennent au peuple la monnaie nécessaire à lui faire croire par le plaisir qu’il est possible d’être heureux sans vision. C’est la bête de la terre de l’Apocalypse, celle qui  « faisait que la terre et ses habitants adoraient la première bête » Ap 13,12.  « Elle séduisait les habitants de la terre par les prodiges qu’il lui était donné d’opérer» Ap 13,14.

Les multinationales et la science économique donnent au peuple de quoi survivre et payer la publicité. On a inventé la science économique qui a remplacé le bon sens par une logorrhée déguisée en mathématique et qui a délivré des diplômes sanctionnant les étudiants qui avaient répété sans comprendre tout ce qu’on leur avait embecqué. La science économique cherche sans succès à démontrer qu’il y a des solutions hors bon sens. Elle est la référence officielle nobélisée des deux erreurs sur l’augmentation de la richesse par l’augmentation de la production et par l’augmentation des échanges. La science économique a envahi les multinationales qui, déconnectées de la réalité, ont besoin des banques pour cacher leurs pertes. Les multinationales font de la cavalerie entre elles pour dégager des bénéfices fictifs. Grâce au principe irréaliste de pérennité de la comptabilité, elles peuvent présenter en toute légalité, des passifs sous-évalués et des actifs surévalués.

La recherche et l’innovation. La recherche récupère de belles intelligences déboussolées et les met au service de qui la paye sans se préoccuper d’où vient l’argent, du vrai but recherché et des deuils que les innovations généreront. La recherche vit dans le cercle fermé « demain paiera et demain sera mieux grâce à l’innovation ».

Les politiques, pour ne pas faire trop travailler au présent les électeurs-consommateurs, veulent faire travailler le passé par l’augmentation de la ponction fiscale, faire travailler le futur par l’augmentation de la dette et faire travailler les autres par la balance commerciale excédentaire. Si la balance commerciale est déficitaire on fera travailler davantage le passé et le futur, c’est-à-dire les électeurs-consommateurs et leurs enfants. Les politiques nous ont construit un pays de Cocagne illusoire fondé sur l’esclavage dans l’espace qu’est le mondialisme et sur l’esclavage dans le temps qu’est la dette, un eldorado où l’homme n’aurait plus à travailler mais la partie des peuples encore au travail vit de plus en plus mal de recevoir systématiquement sur la tête le marteau que leurs dirigeants ont envoyé en l’air pour que leurs électeurs ne se fatiguent pas.

Les spectateurs des déviations

Les peuples changent leurs dirigeants chaque fois qu’ils le peuvent et constatent que tout empire. Mais ils ont été formatés à croire à l’esclavage dans l’espace pour payer moins cher et à l’esclavage dans le temps pour ne même plus se poser la question du « Qui paye ? ». On les a même formatés à limiter dans leurs têtes l’esclavage au vilain esclavage des gentils noirs par les méchants blancs.

Les intellectuels sont en voie de disparition. Les derniers spécimens comme Michel Onfray disent «  Le bateau coule, mourez debout ». D’autres comme Jacques Attali se réfugient dans la logorrhée en fondant tout sur le marché, la démocratie et l’initiative personnelle. Mais le marché dit que l’homme ne vaut plus rien depuis que l’humanité est passée en deux siècles de 1 à 6 milliards d’individus alors que la démocratie dit rigoureusement l’inverse en faisant semblant de sacraliser l’individu. Le message intellectuel d’Attali traduit en français n’est que « Débrouille-toi entre moins l’infini et plus l’infini ».

Les religions par une absence d’analyse incroyable, se sont auto réduites au monde des Bisounours sans vision, sauf une partie de l’Islam qui, sur une lecture littérale du Coran soigneusement éludée, enflamme encore.

III Les axes de solutions

Non par calcul mais par simple sédimentation des médiocrités dans une société sans vision, nous avons construit une société monstrueuse et totalement instable. Nous assistons même à la querelle désolante bien que sans doute de bonne foi entre ceux qui comme l’Union Européenne veulent plus de mondialisation pour avoir moins de dettes, et ceux qui comme Mélenchon & Co, veulent plus de dettes et moins de mondialisation.

Il nous faut pourtant répondre à la question dramatique à laquelle nous sommes chaque jour davantage confrontés et qui est de savoir s’il y a un autre moyen que la guerre pour nous remettre les yeux en face des trous. Y répondre positivement est le devoir des générations actuelles.

La direction pourrait être celle-ci :

1 – Expliquer ce qui se passe à un peuple perdu, anesthésié et étourdi pour lui redonner une vision, le réveiller et le dégourdir. Redonner en premier lieu sa place à la coopération face à la concurrence et ensuite leurs places aux devoirs face aux droits, au travail face à la dette, à la fraternité face à la solidarité, à la rigueur face au laxisme, au réalisme face au rêve.

2 – Retrouver notre souveraineté pour pouvoir agir.

3 – Ne pas importer plus que ce que nous exportons et fabriquer en France, même plus cher, ce que nous importons sans être capable de le payer. C’est l’esprit de la charte de La Havane et de l’Organisation Internationale du Commerce, mère de la parricide Organisation Mondiale du Commerce.

Donner par ces décisions conformes à l’O.I.C. mais opposées à l’U.E. et à l’O.M.C., du travail à tous les nationaux qui en demandent, par la création d’entreprises de production à capital mixte public-privé.

4 – Une fois les Français au travail, rééquilibrer petit à petit pour faire payer par le présent ce qui est consommé au présent en renonçant à faire payer le passé par l’impôt et le futur par la dette. Là est évidemment le plus gros problème mais qui ne pourra être abordé que lorsque les trois premiers points auront été réalisés.

La Société Protectrice des Politiques

J’ai copié-collé cet article paru dans Contrepoints section Economie internationale le 15 juillet 2016 en laissant le nom de l’auteur pour lui faire honte.

L’Irlande, championne mondiale de la croissance (+26% !)

Par Thibault Doidy de Kerguelen.

Une croissance record occultée par les médias
Alors que les technocrates socialistes français se vantent de leur 1,3%, l’Office central des statistiques (CSO) de Dublin a créé la surprise en annonçant ses statistiques trimestrielles de la croissance du pays. Certes, l’activité irlandaise a nettement rebondi ces toutes dernières années, après avoir plongé pendant la crise financière internationale, et l’Irlande est redevenue l’économie la plus dynamique de l’Union européenne.

D’après les chiffres publiés en mars dernier, la croissance irlandaise avait atteint le niveau déjà très enviable de 7,8% en 2015, dopée par les secteurs industriels et de la construction. Mais personne ne s’attendait à ce que le CSO ne publie cette semaine une révision de cette donnée annuelle… annoncée désormais au niveau quasi irréel de 26,3%.

Une fiscalité attractive
L’office a expliqué avoir constaté «une augmentation du nombre d’avions importés en Irlande pour des activités de location d’appareils» et «une augmentation énorme de la masse de capitaux d’entreprises » référencée dans le pays.

Jack Allen, analyste chez Capital Economics, a souligné qu’il s’agissait notamment du reflet de jeux comptables d’entreprises qui délocalisent leur siège en Irlande pour y bénéficier d’une fiscalité attractive (12,5% d’impôt sur les sociétés). «Le capital de ces entreprises est dès lors transféré dans le bilan de l’Irlande, ce qui dope son PIB», a-t-il précisé.

Une preuve supplémentaire, s’il en fallait une, qu’une fiscalité intelligente est créatrice d’activité, d’emplois et de richesses tandis qu’une fiscalité confiscatoire est génératrice de paupérisation et de fuite d’activité.

Comment peut-on à ce point mélanger activité et prospérité ? Comment peut-on considérer le PIB comme une richesse alors que ce n’est que le constat d’un mouvement comptable ? Piller une banque est une activité qui donne de surcroît des activités supplémentaires à la police et à tous ceux qui verront transformée en richesse toute leur production. Cela ne donne de la prospérité qu’à quelques-uns. Trouver une ruse pour faire payer les autres est l’activité fondamentale de l’Union européenne et cela crée de l’activité partout pour tenter d’éteindre les incendies que cela crée.

L’Irlande avec son impôt sur les sociétés à 12,5% récolte tous les sièges sociaux et l’on facture en Irlande et en euros toute l’activité européenne réelle de Google, d’Apple et d’Amazon. Ce n’est pas le capital de ces entreprises qui est incorporé au PIB comme l’aurait soutenu un analyste de plus payé à scribouiller. Ce ne sont pas les avions qui sont importés en Irlande mais la facturation de leur location partout en Europe. Les Européens achètent les avions, les Européens les utilisent, les Européens payent mais les sociétés délocalisent leurs sièges à Dublin pour ne payer que 12,5 % d’IS. Facturant en Irlande, cela rentre évidemment dans le PIB irlandais puisque le PIB n’est que le constat des facturations passées et réglées. On a abandonné dans le silence le plus total le PNB qui ne prenait en compte que la facturation des nationaux pour le PIB qui ramasse toutes les facturation d’étrangers faites dans le pays. Quelle différence avec le pillage d’une banque si ce n’est que l’UE l’a rendu légal et a interdit que la police traque les escrocs ?

Au moins grâce au Brexit les Anglais ne verseront plus la redevance à l’état irlandais. Reste la seule question assez difficile tellement tout est possible : l’UE va-t-elle exploser ou imploser ? Elle n’est définitivement plus que la S.P.P., la société protectrice des politiques… et de leurs affidés.

Le capitalisme en soins palliatifs

 

Personne ne semble avoir envie d’analyser le dogme essentiel de notre économie qui ne supporte pas les hérétiques tellement il a pénétré les cerveaux. Ce dogme baigné de bonnes intentions est :

Nous nous en sortirons par la croissance créatrice de richesses.

 De là toutes les querelles affligeantes entre ceux qui savent tous ce qu’il faut faire pour que la croissance revienne et qui s’extasient en cercle devant son frétillement à 0,1%.

Ce dogme est lui-même fondé sur la croyance que la recherche du profit est le moteur de l’humanité alors que les deux moteurs de l’humanité sont la recherche du pouvoir et celle de la gloire, la recherche du profit n’en étant que le carburant dans le système capitaliste.

Le capitalisme fait croire à une création de richesses alors que cette richesse est mythique car elle n’est qu’un regard qui change suivant les individus et les groupes, suivant le lieu et le moment. Cette lubie de création de richesses ne tient que grâce à des profiteurs et à des jaloux.

Les profiteurs sont ceux qui dépensent à flots de l’argent que leurs banques croient qu’ils possèdent, les jaloux se divisent en jaloux imitateurs que sont les libéraux et en jaloux destructeurs que sont les anticapitalistes.

Les profiteurs sont les serviteurs du système que l’on trouve à tous les carrefours stratégiques, politiques, financiers, médiatiques et publicitaires. Ils dépensent beaucoup d’argent et génèrent autour d’eux, aux mêmes carrefours et dans toute la société, les jaloux admiratifs et les jaloux vengeurs. Ils sont salariés surpayés, héritiers ou flagorneurs. Ils ont le pouvoir et la gloire qui leur permettent de vivre fabuleusement bien parce qu’ils ont réussi à faire croire que nous créons annuellement des richesses dont ils s’octroient une modeste part. Ils ont réussi à faire croire à leurs fortunes en générant des jaloux. Ils ont réussi à faire croire qu’en travaillant normalement un individu pouvait donner à ses enfants plus qu’il n’a reçu de ses parents et que l’enrichissement par le travail était possible sans appauvrissement d’autres personnes. Ils ont fait de leurs victimes leurs complices

Les jaloux admiratifs et imitateurs sont les libéraux qui se divisent eux-mêmes entre ceux qui élucubrent des théories et ceux qui travaillent comme des bêtes pour changer de catégorie. Une infime minorité y arrive en vendant sa start-up ou en gagnant au loto.

Les jaloux vengeurs et destructeurs sont les anticapitalistes qui montrent du doigt la richesse des profiteurs en exigeant une nouvelle répartition : « 1% des humains possèdent 99% des richesses de LA planète » ! Un ami m’a écrit : « l’immense majorité ne tire pas de son travail une part équitable tandis que les fonds de pensions, les banques, les compagnies d’assurances et autres « machins » financiers accumulent des fortunes colossales ». Il m’écrit ce que les profiteurs veulent qu’il croit pour que cela tienne, à savoir que l’on crée des richesses et que le seul problème est de savoir comment se les partager. Lui vit mal matériellement, eux vivent bien matériellement mais cela n’est possible que parce qu’ils savent qu’ils ne sont pas riches et que cet ami croit qu’ils le sont. Leur richesse n’est qu’illusoire. Ce sont des actions en bourse valorisés par eux-mêmes ou leurs semblables à des prix qui sont ce qu’ils échangent entre eux. Ce sont des propriétés qui leur seront reprises quand elles ne seront pas détruites. Les riches familles égyptiennes ou romaines ont-elles eu des héritiers ?

Tous alimentent le dogme et les jaloux rendent le système presque réel en l’admirant ou en l’abhorrant.

La réalité est que l’économie qui est l’action dans la maison, dans l’oïkos, est un échange du travail des êtres de la maison. Normalement tout est don et contre-don ce qui apparaît à un observateur inattentif comme du troc alors que le troc qui n’a jamais existé aurait remplacé la confiance par la simultanéité. Dans le contre-don il y a reconnaissance que le don de l’autre est richesse aux yeux du donneur et du groupe. Mais la notion d’enrichissement sans appauvrissement volontaire de l’autre n’existe pas car tout n’est qu’échange non simultané de travail.

La monnaie a remplacé partout le contre-don lorsque les groupes sont devenus trop nombreux pour que la confiance suffise à l’harmonie. La monnaie était donc un support objectif d’énergie humaine concrétisant le contre-don en étant un symbole concret, recherché, rare, pérenne, transportable et divisible. Mais la monnaie nous a fait oublier qu’il n’y a pas d’enrichissement sans appauvrissement d’un autre. Nous avons théorisé le don et le contre-don en production, dépense et revenu sans souvent comprendre que la production était ce qui était vendu, le revenu était la source de la monnaie utilisée pour acheter et la dépense le constat de leur échange. En appelant cet échange PIB on a fait croire que c’était une ressource alors que ce n’est que le constat d’un échange de deux valeurs.

L’idée est venue, puisque la monnaie remplace le travail du contre-don, de multiplier la monnaie pour éviter le travail. Depuis toujours on pillait, on mettait à sac et on réduisait en esclavage pour avoir de la monnaie et éviter le travail et l’idée de travailler sur la monnaie existe aussi depuis toujours par le billonnage, ce trafic illégal ou caché de monnaies défectueuses. Mais c’est depuis que les monnaies ont été déconnectées de toute référence objective (15 août 1971) que les freins ont sautés.

C’est l’art du capitalisme d’avoir inventé la création de richesses alors que seul l’appauvrissement en monnaie de quelqu’un reconnait une production en tant que richesse. Cette reconnaissance par l’échange ne génère aucune création de richesse pour le groupe.

Mais l’illusion fait vivre…

On a inventé l’investissement, la rentabilité, le profit et on a remplacé le travail par la dette. Rien que pour la dette publique, la France était ruinée après les guerres de Louis XIV et avait une dette publique insupportable à l’époque de 1,5 milliard de livres (12 milliards d’euros) qui a amené le système de Law et la ruine de tant de Français. Aujourd’hui nous en sommes à une dette publique française de 2.000 milliards d’euros et la dette publique mondiale continue de monter de plusieurs milliards d’euros par jour.

On fait tout pour faire payer les autres par l’exportation ou par le bidouillage des monnaies et cela nous retombe généralement sur le nez car nous ne sommes pas les meilleurs en bidouillage.

La FED et la BCE fabriquent sans arrêt, qui des dollars, qui des euros, des monnaies qui ne valent objectivement plus rien. Mais tant que le boulanger et son client croiront ensemble qu’un euro est aussi intéressant qu’une baguette de pain, le système tiendra. Mais dès que la confiance dans le système malhonnête disparaîtra, le papier monnaie ne sera plus que du papier comme les billets de Law en 1720, les assignats de la révolution ou les emprunts russes. C’est parce que certains le savent qu’à Davos on parlait suppression totale de la monnaie. Comme si, une fois de plus on voulait simplement casser le thermomètre.

La mondialisation de l’aveuglement

Quand un problème est mal posé, il n’y a pas de solutions. Cette vérité simple voit la gauche s’entredéchirer.

Il y a ceux qui rejoigne le MEDEF et la mondialisation avec Macron, Hollande, Vals et El Khomri pour rappeler sans le dire que l’humanité est passée de 1 milliard en 1800 à 7 milliards aujourd’hui et qu’un homme ne vaut donc plus rien ou plutôt ne vaut que le prix d’un Chinois qui parait déjà trop cher puisqu’on a trouvé encore moins cher d’abord au Vietnam et maintenant en Ethiopie. C’est le camp des « réalistes » qui gouvernent la France sans discontinuité depuis que Mitterrand a remplacé Mauroy par Fabius en 1984. Ce camp inclut la droite et le centre qui n’ont que les querelles de personnes pour se faire remarquer. L’ineffable Dominique Reynié des Républicains a d’ailleurs mis sur le net une pétition en faveur de la loi El Khomri qui a été immédiatement signée par le président du MEDEF, Pierre Gattaz et par son prédécesseur Laurence Parisot. Les réalistes ont fait oublier l’O.I.C. et la coopération entre Etats pour créer l’O.M.C. et la compétition entre Etats, tout en priant partout pour que la manne divine qu’ils appellent croissance retombe enfin pour donner la prospérité qu’ils continuent sans vergogne à promettre pour être élus. En attendant ils accompagnent la baisse générale du niveau de vie par des moyens aussi divers que sophistiqués que chacun peut observer. Le résultat est depuis 1984 la montée du chômage, de la dette et du déficit du commerce extérieur, la montée de la dette tentant de remplacer l’esclavage dans l’espace qu’est la mondialisation par l’esclavage dans le temps qu’est la dette et que les Français commencent à entrapercevoir. ,Il n’est pas sûr qu’ils l’acceptent.

Il y a ceux qui ont bien compris que les « réalistes » entraînaient la France vers un nivellement mondial par le bas réduisant les civilisations à des amusettes pour touristes mais ceux-là se convainquent eux-mêmes que, comme le dit Mélenchon « La France n’a jamais été aussi riche » et peut donc distribuer sa richesse au peuple tout en se protégeant. Ceux-là se contentent d’être souverainistes  et sont rejoints par Dupont-Aignan et Florian Philippot

Il y a encore ceux qui comme Martine Aubry, Daniel Cohn-Bendit ou Axel Kahn veulent la mondialisation et trouvent dans l’idéologie la force d’améliorer la vie de tous les habitants de la Terre. Ils ont signé une tribune dans Le Monde du 23 février 2016 :

 » La gauche doit porter en la matière de grandes réformes sources de compétitivité pour les entreprises et de progrès social pour les salariés, telles que la sécurité sociale professionnelle, qui permettent à chacun au XXIe siècle de rebondir en cas de difficultés, sans passer par la case chômage, et de progresser tout au long de sa vie professionnelle ».

Avec eux le problème est résolu par la gauche idéologique qui combine sans vergogne la compétitivité avec le Bengla Desh et le progrès social pour tous. Qui paye ?

Le drame est que tous les dirigeants de la Terre ont été déformés dans les universités françaises, américaines ou anglaises et qu’ils attendent tous la croissance comme le messie. Ils l’appellent tous développement économique alors qu’elle n’est qu’augmentation des dépenses. A titre d’exemple Sri Mulyani Indrawati, venant d’Indonésie, a été formatée dans l’université américaine de l’Illinois puis a travaillé à Atlanta en Georgie à l’US Agency for International Development (USAID) avant de devenir ministre des finances d’Indonésie et enfin directrice générale de la Banque mondiale. Dans une interview au Figaro du 27 février 2016 elle dit :

« Plus que jamais l’objectif prioritaire doit être la réduction de la pauvreté et l’amélioration des conditions de vie dans des pays touchés par les conflits ou dans des pays fragiles. L’objectif doit être de redonner de l’espoir aux populations. Beaucoup s’enfuient de chez eux parce qu’ils ne voient pas d’autre option. La croissance économique doit par conséquent aussi être inclusive et se soucier d’abord des 40% de la population la plus pauvre. La lutte contre les inégalités devrait être partout une priorité. Plus que jamais les questions de gouvernance, de réforme des institutions et de lutte contre la corruption doivent être traitées pour créer des sociétés justes qui permettent aux populations de réaliser leur potentiel ».

Comment peut on voir ce qu’il faut faire si l’on croit partout que la dette peut remplacer le travail, que la croissance paiera la dette et que les populations pourront réaliser leur potentiel c’est-à-dire vivre au pays de Cocagne ? De qui les politiques de toute la Terre se moquent-ils ? Ne sont-ils pas en train de tuer notre civilisation ?

De la richesse, de la croissance et de la dette

A en croire Jean-Luc Mélenchon la France n’a jamais été aussi riche, ce que semble très bien comprendre, à l’autre bout de l’échiquier politique, la député européenne ENL, la doctoresse Joëlle Mélin qui croit le programme du front national possible, vu la richesse de la France.

Il est vrai que Madame Bettencourt n’aborde pas les difficultés de la vie comme un quelconque smicard et que, si l’on est riche, les problèmes sont généralement plus simples à résoudre. C’est ce que pensent les politiques qui se croient au centre de l’omelette en dédaignant ce qu’ils appellent les extrêmes, et qui ont tous trouvé la même réponse à nos problèmes: le retour de la croissance. Elle est pour eux tous totalement indispensable et chacun explique que c’est sa priorité absolue et qu’il a, lui, la meilleure méthode pour y arriver sans jamais la détailler puisqu’elle n’est que l’augmentation du PIB que peu de gens comprennent. François Hollande n’a que la croissance à la bouche et notre ex-ministre des finances Pierre Moscovici, recasé à Bruxelles comme commissaire européen aux affaires économiques, le répétait encore le 22 octobre sur Europe1 en précisant qu’il n’était plus un homme politique français: « La priorité de la commission, il n’y en a qu’une, c’est de faire en sorte que la croissance s’améliore  » et pour ceux qui n’auraient pas bien entendu il rajoutait : « Cette commission, je le répète, n’a qu’une volonté, plus de croissance … et toutes nos politiques sont orientées vers cela ». La même commission n’arrête pas par ailleurs de morigéner les Etats qui dépensent trop et qui font donc de la croissance. La commission dit tout faire pour augmenter la croissance, c’est-à-dire augmenter nos dépenses mais trouve que nous dépensons trop.

Si l’on élimine l’explication de mettre d’urgence la commission en hôpital psychiatrique, y a-t-il une autre explication que celle qui constate qu’ils n’ont jamais compris ce qu’est le PIB et sa croissance que l’on appelle la croissance ?

Si la solution était de faire augmenter le PIB et donc de faire de la croissance, ce serait si simple ! On n’aurait qu’à embaucher des centaines de milliers de fonctionnaires et cela ferait de la croissance sous forme de PIB non marchand. Ce qui est en revanche très compliqué c’est de comprendre le grand écart de Nicolas Sarkozy qui voulait diminuer le nombre de fonctionnaires tout en voulant aller chercher la croissance avec les dents. N’aurait-il pas compris lui aussi que faire de la croissance c’est simplement dépenser davantage et que dépenser davantage fait automatiquement de la croissance ? On pourrait aussi pour faire de la croissance, casser, salir, saccager et cela obligerait à nettoyer, à réparer, à reconstruire et on ferait chaque fois de la croissance, du PIB marchand, et cela donnerait de l’emploi. On a vécu cela en décembre 1999 où dans le même mois nous avons eu une croissance extraordinaire qui a généré une valeur ajoutée tellement fantastique que l’Etat qui taxe la valeur ajoutée par la TVA en a rougi de plaisir en se constituant ce que l’on a appelé à l’époque la « cagnotte » . Nous avions simplement eu la chance d’avoir le pétrolier Erika qui avait mazouté 400 kilomètres de nos côtes le 11 du mois et deux tempêtes qui avaient saccagé la France d’abord le 26 puis entre le 27 et le 28 décembre.

On aurait pu croire qu’en cette fin de XXème siècle nous aurions enfin compris grâce à ces trois drames que le PIB n’est que la somme de toutes nos dépenses et qu’on ne peut pas à la fois les diminuer pour être intelligents et les augmenter pour faire de l’emploi. Savoir s’il faut augmenter ou diminuer nos dépenses, augmenter ou diminuer le PIB, faire de la croissance ou de la décroissance, est sûrement une question intéressante mais il faudrait systématiquement lui ajouter la question complémentaire que personne ne se pose jamais : Qui paye ? Qui paye la croissance ?

Hélas ! La mode est de croire que la croissance ne s’achète pas et qu’elle crée même des richesses. On entend même tous les politiques dire que l’emploi reviendra avec la croissance, ce qui est vrai car quand on dépense, il faut bien des gens pour faire les travaux utiles ou inutiles. Mais personne ne se pose la question de savoir qui paye cette croissance puisque chacun est formaté à croire que la croissance enrichit.

Les politiques s’agitent fébrilement pour à la fois faire absolument des économies mais surtout ne pas en faire pour ne pas casser la croissance. On se sert du vocabulaire pour faire croire qu’on a la solution. Nous allons arrêter de gaspiller et davantage investir.Ceux qui se disent de droite, plus l’exécutif en place, prônent l’austérité et la rigueur en pensant qu’en dépensant moins, la croissance reviendra et que l’on pourra alors dépenser le fruit de la prospérité. Ceux qui se disent de gauche prônent l’arrêt de l’austérité en pensant qu’en dépensant plus on fera revenir la croissance et que l’on pourra alors dépenser moins et rembourser la dette. Dépenser plus pour pouvoir le moment venu dépenser moins ou dépenser moins pour pouvoir le moment venu dépenser plus est le choix intelligent que les politiques nous proposent. Tant qu’ils confondront la croissance avec la manne divine les hommes chercheront leurs solutions ailleurs que dans la classe politique.

La plus mauvaise des solutions est de simplement reporter le problème pour ne pas avoir à l’affronter. C’est ce que nous faisons avec la dette pour le plus grand plaisir du monde bancaire qui prête de l’argent qu’il crée en polluant tout le sens de la monnaie. Cette fausse solution a contaminé toute la Terre par la mondialisation de la communication.

Aujourd’hui le peuple est endetté, les entreprises sont endettées et les Etats ont un endettement public qui donne le frisson comme le montre cette carte:.

Qui va rembourser ces dettes ? Qui a compris qu’il n’y a pas de création annuelle de richesse et qu’au bout du compte on demandera aux peuples de payer, ce qu’ils ne pourront pas faire et ne voudront d’ailleurs pas faire tellement on leur a fait croire que le progrès c’était vivre au pays de Cocagne.

Pour l’instant nous en sommes encore au stade où chacun veut faire payer les autres, ce qui casse le lien social déjà fragile.

La démagogie de la création de richesses futures

Je reviens sur le sujet tellement le dé-formatage est difficile mais essentiel.

Le monde financier est fondé sur le prêt d’un argent qu’il n’a pas et qu’il crée par la double écriture pour se nourrir des intérêts. Son autre activité qui était accessoire et qui devient première consiste à spéculer sur tout ce qui peut l’enrichir par le jeu, en appauvrissant quelqu’un d’autre qu’il ne connaîtra jamais.

Cette définition un peu dure n’attend que ses contradicteurs qui tous, vont justifier l’action des banques, par l’utilisation des richesses futures créées par l’investissement, le « sésame ouvre-toi » de l’économie actuelle.

Cette ligne de défense s’appuie sur le formatage universitaire de nos élites qui a profondément ancré dans les têtes, l’idée fausse que les entreprises créent de la richesse qui permet de rembourser les emprunts.

Les entreprises créent en effet de quoi éventuellement satisfaire les désirs mais ce qu’elles créent en biens ou en services, n’est richesse que si elles trouvent des acheteurs qui viennent s’appauvrir en monnaie pour que la production de l’entreprise devienne une richesse en nature.

La Terre aussi crée chaque année des fruits, des poissons et du gibier qui sont des richesses parce qu’ils sont consommés. S’ils ne sont pas cueillis, pêchés ou chassés, ils restent un réservoir de nourriture le temps de leurs vies mais ne sont évidemment qu’une richesse potentielle et provisoire. Ils serviront d’engrais naturel en fin de vie. S’ils sont cueillis, pêchés ou chassés mais non consommés, ils vont pourrir et il faudra nettoyer et désinfecter. Ils ne sont clairement des richesses que parce qu’ils ont été autoconsommés par les cueilleurs, les pêcheurs ou les chasseurs ou parce qu’ils ont été vendus à des acheteurs qui se sont appauvris en monnaie pour pouvoir les consommer. Dans les deux cas les richesses n’ont existé que parce qu’elles n’existent plus. Il ne viendrait à l’idée de personne d’utiliser ces fruits, ces poissons ou ce gibier après qu’ils aient été consommés.

C’est pourtant la base même de notre système économique construit par le système bancaire et la science économique avec la complicité des électeurs-consommateurs que nous sommes car cela nous plait beaucoup et si les gens intelligents qui nous gouvernent disent que c’est possible !

Personne ne se demande pourquoi depuis l’aube de l’humanité, il a fallu attendre le milieu du XXème siècle pour qu’un peuple croie pouvoir s’enrichir sans appauvrir quelqu’un d’autre par la guerre et le pillage. Jusqu’à présent les peuples vivaient heureux sans s’enrichir mais en travaillant à vivre heureux. Etaient-ils bêtes ! Nous nous avons inventé par notre intelligence un eldorado sans travail, un pays de cocagne qui attire bien évidemment toute l’humanité.

Par un singulier oubli du bon sens nous appelons production (PIB) tout ce que nous dépensons, nous appelons cela « la création annuelle de richesse » et nous fondons de merveilleuses théories sur la deuxième utilisation de ce qui a déjà été consommé. Par exemple nous empruntons pour acheter une voiture et, au lieu de nous inquiéter d’avoir à payer demain la banque, nous nous rengorgeons en ayant fait de la croissance et du PIB, et en « relançant l’économie » ! La banque est ravie puisqu’elle va toucher des intérêts sur de l’argent qu’elle a créé et qui sera détruit au remboursement. La classe politico-médiatique est ravie car cela dope l’économie et la croissance. La science économique lui a rappelé que Dieu avait dit à Moïse, à Jésus ou à Mahomet que dès qu’il y avait une croissance de 1,5 % l’emploi repartait. Le Parlement, composé de gens n’ayant très majoritairement connu que l’école et la politique s’en contente et s’intéresse surtout à ce que le mot imbécile ne reste pas uniquement masculin. On ne dit plus « Demain on rase gratis » mais nous disons « C’est demain qui paye ».

Mais comme on veut payer demain avec ce que l’on a déjà consommé aujourd’hui, cela ne marche pas. L’appauvrissement équivalent à l’enrichissement des électeurs, s’accumule donc inexorablement dans les entreprises et les Etats et nous assistons au jeu pitoyable mangeur de temps, d’énergie et d’intelligence qui consiste à faire payer le désastre à l’autre, avec des dés pipés. Les joueurs sont l’Etat, les entreprises, les clients et les contribuables. On essaie bien de faire payer les étrangers mais au bout du compte c’est nous qui payons pour eux. Le drame est que ce jeu pitoyable devient impitoyable et que les clients comme les contribuables se laissent de moins en moins tondre la laine sur le dos et commencent à s’interroger.

Tout ça pour flatter l’électeur !

Qui va nous remettre les yeux en face des trous avant que la grande violence ne le fasse ?

Nous sommes tous responsables

Il y a toujours une cause à un évènement et une cause à cette cause. On peut remonter d’un cran chaque fois pour trouver à chaque niveau la cause de l’évènement qui va devenir lui-même la cause de la suite du phénomène qui engendrera à son tour,… etc.

Dans la confusion actuelle il devient difficile de prendre conscience de la source de tous nos maux tellement elle est submergée par un océan d’explications superficielles et contradictoires, ce qui poussent beaucoup à renoncer à comprendre et à se réfugier dans un corporatisme défensif ou un intellectualisme protecteur.

L’erreur de base est d’avoir oublié qu’une richesse n’est qu’un regard et qu’elle peut être aussi un encombrant ou carrément un déchet. Une maison merveilleuse construite sans permis sur un site corse admirable sera suivant les yeux qui la regarderont une richesse, une gêne ou un édifice à démolir d’urgence. Il est regrettable que la science économique n’ait jamais pris le temps d’étudier la différence entre une richesse, un encombrant et un déchet en considérant très puérilement que tout ce qui est produit est richesse et en s’égarant dans le chiffrage et la mathématique.

Pour s’aveugler elle-même la science économique a inventé la phrase indéfendable qui est pourtant en tête de tous les livres d’économie : « Au début était le troc et un jour c’est devenu trop compliqué et on a inventé la monnaie ». Cette science matérialiste nous a formaté pour que nous soyons convaincus qu’au début est l’échange des avoirs alors que quiconque a fondé une association ou un couple sait bien qu’au début est l’échange des êtres à l’intérieur d’un but commun.

On en arrive à la notion délicate d’enrichissement.

Si l’on regarde une société sans monnaie comme par exemple une tribu où chacun fait sa part, l’enrichissement d’un membre de la tribu n’est pas simple car il fait appel aux multiples motivations qui en poussent d’autres à s’appauvrir. Ces motivations sont souvent du domaine du sacré et s’estompent dès que les équilibres sont menacés.

Dans une tribu, c’est le chamane et le chef qui donnent une impression de richesse puisqu’ils ont le pouvoir et le mot richesse vient du mot franc rikki qui veut dire pouvoir. Chez les autres membres de la tribu il n’y a pas d’enrichissement sauf si certains désirent s’appauvrir pour en honorer un autre. Un individu ne s’enrichit que par l’appauvrissement d’autres et la tribu ne s’enrichit que par ce que donne la nature suivant des cycles qui vont de l’année aux millions d’années (Quand on parle en millions d’années les écologistes rappellent fort justement que cycle ne se met pas au pluriel), ou par le pillage des biens d’une tribu rivale vaincue. Il n’y a pas d’enrichissement sans appauvrissement sauf ce que la nature nous donne et que le travail de l’homme va chercher. Les Physiocrates l’avaient parfaitement vu au XVIIIème siècle et la richesse fournie par la nature est grosso modo consommée pour survivre ce qui n’est donc nullement une richesse stockée. Il n’y a quasiment pas de richesse collective stockée.

Dans une société avec monnaie il faut d’abord accueillir le fait que la monnaie n’arrive que lorsque l’échange des êtres commence à avoir des ratés et que le pouvoir cherche à faire travailler les tire-au-flanc. La monnaie est une invention aussi géniale que la roue. Le pouvoir distribue à chacun une quantité de matière recherchée, rare, pérenne et divisible, en mémoire de son apport passé au groupe. Moneo est en effet une forme causative de la racine grecque men et la cause du monument comme de la monnaie est de se souvenir. Junon Moneta est la déesse qui fait se souvenir. La monnaie comme la roue a été inventée sur tous les continents par quasiment toutes les civilisations et, après que l’on ait chiffré les biens et les services et initié une impression de troc, elle permet de forcer sans contraintes et en douceur chacun à se rendre utile. Si aujourd’hui la monnaie a malheureusement complètement perdu son sens, elle reste de l’énergie humaine stockée et personne ne peut en fabriquer s’il n’y a pas stockage d’une nouvelle énergie humaine. Si l’on en fabrique tout de même, elle s’autodétruit par la dévaluation et la hausse des prix comme on l’a vu au XVIème siècle avec les galions espagnols chargés d’or et d’argent, au XXème siècle avec l’édification sur rien du monde financier et aujourd’hui avec les folies des Politiques qui nous mènent à l’explosion.

Mais l’introduction de la monnaie a eu un effet pervers car le chiffrage des biens et des services n’a bientôt plus été un système à somme nulle remplaçant simplement l’échange des êtres comme dans une tribu mais est devenu une proposition malsaine et mensongère d’enrichissement sans appauvrissement apparent de l’autre En effet dès que quelqu’un reçoit une somme lui permettant d’épargner, il est convaincu de s’enrichir par la bonne gestion de l’argent qu’il reçoit sans appauvrir personne. Malheureusement nous le lui laissons croire car un individu qui croit s’enrichir vote bien et pour cette raison nous rentrons collectivement dans le monde de l’apparence et du faire croire avec une intelligence stupéfiante. Les actions sont tous azimuts.

Le premier abus de confiance a été de faire croire que le Produit Intérieur Brut était comme son nom l’indique un produit. Il n’est en fait qu’une mesure de l’activité faite par tout ce que nous dépensons bêtement ou intelligemment et que l’INSEE chiffre soit par notre appauvrissement soit par les marchandises et services vendus, soit par les transactions effectuées. On trouve évidemment quand on ne se trompe pas la même mesure en euros de notre agitation qui vient de plus en plus de marchandises importées et d’argent prêté qu’il faudra donc payer deux fois. Mais la classe politico médiatique continue à présenter le PIB comme une création annuelle de richesses alors qu’il n’est que dépenses. Tous les médias raisonnent sur des pourcentages de PIB comme si c’était un pourcentage de richesses faussant habilement tous les raisonnements.

Nous justifions l’enrichissement des électeurs de leur logement, de leur voiture et de beaucoup de biens matériels par l’enrichissement du groupe par les entreprises et leurs fameuses valeurs ajoutées. Or les entreprises ne créent aucune valeur. Elles ventilent l’argent de leurs clients à leurs salariés, à leurs actionnaires, à leurs fournisseurs et à la collectivité. Pour capter l’argent de leurs clients les entreprises les séduisent soit par des services immédiatement consommés soit par des objets toujours présentés comme des richesses alors qu’ils deviendront tous à plus ou moins brève échéance, encombrants puis déchets . Les entreprises dépensent beaucoup d’argent pour acheter des machines qui fabriquent en continu d’abord des richesses puis des encombrants

Elles sont obligées alors de faire à nouveau des dépenses énormes publicitaires pour transformer les encombrants souvent inutiles en richesses. Pour faire tourner les machines on féminise les hommes, on virilise les femmes et surtout le système bancaire prête aux clients impécunieux de quoi acheter en leur racontant qu’ils rembourseront les emprunts par leur création future de richesse. Le groupe ne crée pas de richesses mais disperse par les entreprises les richesses inexistantes des banques.

Ainsi les électeurs s’enrichissent individuellement quand collectivement nous ne créons pas de richesses. L’appauvrissement compensatoire s’accumule dans les entreprises et dans les Etats et l’on observe alors une conséquence fantastique et perverse dont nous ne savons pas sortir : pendant que les PME sont condamnées à être hyper performantes ou à déposer le bilan, les grandes entreprises et les Etats accumulent avec les banques les pertes abyssales très bien cachées légalement par la comptabilité et l’appui bancaire. A chaque changement de président on passera quelques milliards d’euros de provision pour continuer à tenir. Les fusions permanentes aideront à cacher provisoirement le désastre.

On assiste alors à deux jeux particulièrement pervers.

Le premier est la bataille permanente pour se refiler la patate chaude de l’appauvrissement, bataille où tous les coups sont permis s’ils ne sont pas trop visibles entre l’Etat, les entreprises et les citoyens qui sont devenus des clients et des contribuables. Observer à distance cette bataille au couteau d’une ingéniosité admirable laisse de l’espoir sur notre capacité énergétique et inventive.

L’autre jeu est l’import-export. Nous avons malheureusement oublié l’esprit de la Charte de La Havane fruit provisoire du bon sens d’après-guerre dans les rapports internationaux comme l’était le programme du Conseil National de la Résistance pour notre organisation interne. La Charte de La Havane votée à l’unanimité par tous les membres de l’ONU disait qu’il ne fallait pas faire payer les autres et que l’on ne pouvait importer que si l’on exportait autant. C’est d’ailleurs normalement par ce biais que les monnaies s’évaluent. Chaque pays paye avec sa propre monnaie et si un pays importe beaucoup et exporte peu, sa monnaie se dévalue. S’il exporte beaucoup et importe peu, sa monnaie se réévalue. Cela doit rester quantitativement faible par rapport à la vie d’un pays qui ne veut pas de la liberté du renard dans le poulailler et qui surtout ne veut pas dépendre des autres. Mais nos grandes entreprises et l’Etat ont voulu avec l’OMC cette liberté qui est l’inverse de la Charte de La Havane que l’on nous a fait oublier. Comme nous sommes un peu hâbleurs le résultat est évidemment catastrophique et nous sommes passés de 14 milliards d’excédent à 60 milliards de déficit.

Nous allons évidemment à l’explosion d’un système impossible où la classe politico médiatique ne sait plus quoi proposer si ce n’est d’aller encore plus vite vers le mondialisme où des milliards d’hommes ayant les mêmes désirs (puisque pour eux la civilisation c’est nous) s’entredéchireront pour avoir ce que la Terre ne peut pas produire pour tant de gens.

Mais les vrais coupables ne sont pas les marionnettes du monde politico médiatique mais nous-mêmes qui sommes si contents de vivre beaucoup mieux que nos grands-parents, d’acheter notre logement, d’avoir 5 semaines de congés payés, de partir en vacances sur la Côte ou au ski et surtout de ne pas nous interroger sur le fait qu’aucune civilisation avant nous n’a fait à ce point semblant d’enrichir son peuple en glissant les appauvrissements compensatoires chez les puissants du moment

Je souhaite ardemment que ce billet soit discuté, disputé et diffusé.

La création de richesses

Toute l’économie mondiale est actuellement fondée sur la création de richesses. C’est elle qui va permettre de rembourser aux banques les prêts qu’elles nous font pour investir et pour consommer.

Dans un rapport sorti en octobre 2013 et repris à l’envi par tous les intellectuels de la Terre, le Crédit Suisse nous a appris que « la richesse mondiale a plus que doublé depuis 2000, atteignant un nouveau record historique de 241 000 milliards de dollars ». L’humanité se serait donc enrichie de près de 10.000 milliards de dollars par an depuis le changement de millénaire. Quelle merveille !

Cette « information » a été reprise aussi bien à gauche qu’à droite. A gauche par le Nouvel Observateur en octobre 2013 pour crier au scandale de sa non redistribution et par Jean-Luc Mélenchon qui nous a seriné que la France n’avait jamais été aussi riche. A droite sur France 5 par l’ineffable Dominique Reynié, « agrégé de sciences politiques » (oui cela existe et cela en fait un fonctionnaire avec garantie de l’emploi à vie), directeur général de Fondapol, pourfendeur hautain de tous les populismes et éternel candidat heureusement malheureux à la direction de Sciences Po. Chacun renforce à sa manière et à la méthode Coué, l’idée, totalement fausse mais vitale pour le système bancaire, que le système crée des richesses qui permettent de rembourser les emprunts.

La richesse n’est qu’un regard comme l’est aussi un déchet ou un embarras. L’antiquaire, le brocanteur et le ferrailleur savent que les regards des uns comme des autres ne sont pas identiques et ils en ont fait leurs métiers en faisant se croiser des regards différents. Une maison édifiée sans permis sur un site classé corse est à la fois une richesse pour certains, un embarras pour d’autres, un déchet à éliminer d’urgence pour d’autres encore. Pareil pour l’art moderne ou pour les OGM. Le regard ne se chiffrant pas, on peut approcher la richesse aussi bien en monnaie qu’« en volume » comme dit l’INSEE.

Lorsqu’un client achète un pain à son boulanger, il s’enrichit en volume (en pain) et il s’appauvrit en monnaie alors que le boulanger s’appauvrit en volume et s’enrichit en monnaie. Chacun s’enrichit et chacun s’appauvrit. Les regards évoluent, se croisent mais n’augmentent jamais. On ne peut donc pas créer de richesses car il faudrait pour cela augmenter les regards. Ce qui crée l’impression de richesse c’est que quelqu’un s’appauvrit pour l’obtenir ou est prêt à le faire.

Le calcul de la valeur ajoutée des entreprises montre que la somme de toutes les valeurs ajoutées correspond, au centime près, à la somme des consommations des ménages, des administrations et des collectivités. Il n’y a richesse créée par les entreprises que parce qu’elle est achetée. S’il n’y a pas le regard de l’acheteur prêt à s’appauvrir, il n’y a pas de richesse et nous sommes dans les encombrements et dans les déchets.

La science économique n’a jamais analysé cette évidence et avec la complicité des puissants, l’emprunt est venu casser cet équilibre des regards. Le prêt a toujours existé mais il était sur gages et réservé aux puissants qui le remboursaient soit en se séparant du gage soit en appauvrissant ceux qu’ils dominaient. Mais depuis le XXème siècle le capitalisme a inventé le prêt sans gages en faisant croire que les richesses futures créées rembourseraient l’emprunt. En réalité, en prêtant à l’acheteur de quoi alimenter son regard, en prêtant au vendeur de quoi se payer de la publicité et une force de vente, le système a transformé artificiellement en richesses ce qui n’étaient objectivement qu’encombrements, voire déchets. Mais une richesse n’existant que parce qu’elle est désirée et obtenue, elle ne peut pas servir deux fois et seule la vitesse de circulation de la monnaie va faire croire à la création de richesses. En fait l’enrichissement très réel des individus est compensé par l’appauvrissement caché des entreprises et des Etats qui accumulent les pertes que les techniques comptables permettent de reporter. Mais que ne ferait-on pas pour que l’électeur vote bien et qu’il soit convaincu que la machine tourne et crée des richesses ?

La conclusion est que si le capitalisme a permis comme le fascisme et le communisme, l’édification de fortunes personnelles considérables, il n’est pas plus cohérent et vit son crépuscule dans l’incompréhension générale. L’entêtement des pseudo-élites à croire contre vents et marées à leur système, a créé les millions de morts du fascisme et du communisme. Vu la profondeur de l’entêtement de certains à croire que le capitalisme, si agréable pour eux, est cohérent et ne peut se comparer aux deux autres matérialismes du XXème siècle, la chute risque de ne pas être douce. Elle est pourtant inéluctable et chacun voit qu’elle arrive.

L’ineptocratie

Les Anglo-Saxons ont créé le mot ineptocracy pour définir le système politique américain tant de Bush que d’Obama :

Ineptocraty is a system of government where the least capable to lead are elected by the least capable of producing, and where the members of society least likely to sustain themselves or succeed, are rewarded with goods and services paid for by the confiscated wealth of a diminishing number of producers.

Le net français l’a attribué à Jean d’Ormesson qui n’en a pourtant été que le traducteur. Le net est excusable tellement cette traduction parle bien de nous :

L’ineptocratie est un système de gouvernement où les moins capables de gouverner sont élus par les moins capables de produire et où les membres de la société les moins aptes à subvenir à eux-mêmes ou à réussir, sont récompensés par des biens et des services payés par la confiscation de la richesse d’un nombre de producteurs en diminution constante.

Sur cet intéressant canevas, la classe politique se déchire entre les tenants de la politique de l’offre et ceux de la politique de la demande, pour obtenir de la croissance et de l’emploi puisqu’ils ne savent créer concrètement de l’emploi que par le retour de la croissance, cette fée abstraite que personne n’a envie de définir. Les professeurs d’économie se reposent sur la définition absconse de François Perroux, « La croissance est une augmentation pendant une ou plusieurs périodes longues d’un indicateur de dimension, pour une nation, le produit global net en termes réels », définition que seuls les imbéciles ne comprennent pas comme Andersen nous l’a si bien expliqué dans son conte « Les habits neufs de l’empereur » où il a fallu qu’un enfant vienne dire que l’empereur était nu. Les Politiques et les médias qui ont, eux, bien sûr compris Perroux, l’expliquent tranquillement et sans vergogne comme étant une augmentation des richesses créées, ce qui serait évidemment une manne électorale permettant de surcroît de rembourser demain les emprunts d’aujourd’hui.

Comme personne n’a envie de voir que « l’indicateur de dimension » n’indique que la dimension de l’agitation économique, nous assistons à la farce d’une querelle entre soi-disant experts. Après s’être évidemment cassé les dents sur la politique de la demande, les Politiques, éclairés, illuminés ou aveuglés (rayez les mentions inutiles) par le génie d’Attali déguisé en Macron, se tournent vers la politique de l’offre sur laquelle ils vont à nouveau bien sûr se casser la figure. Il ne faut pas être devin pour l’annoncer, d’abord parce que leurs prédécesseurs ont montré combien c’était inefficace mais surtout parce que la solution ne répond qu’à l’apparence du problème et en rien au problème de fond.

Reprenons l’exemple du marché. Le marché du quartier est-il un peu anémique, ces derniers temps ?

La politique de l’offre va proposer de multiplier les étalages et les marchandises à vendre, partant du principe que les habitants du quartier sont riches et qu’ils achèteront plus dès qu’on leur proposera de belles choses. Si l’on vient à dire que les poches des acheteurs sont vides la politique de l’offre conseillera d’emprunter puisque les richesses créées rembourseront les emprunts et leur intérêt.

La politique de la demande va de son côté proposer de distribuer de l’argent aux habitants pour qu’ils puissent acheter davantage, partant du principe que seule l’absence de monnaie empêche les acheteurs de faire tourner la machine. Si l’on vient à dire qu’il n’y a rien à vendre la politique de la demande dira d’importer puisque les richesses créées paieront les importations.

Tout est toujours fondé sur le PIB création de richesses martelée dans tous les médias à la fois par les Politiques et par les experts de tous poils adeptes de la politique de l’offre ou de celle de la demande. Parmi ces experts l’INSEE figure en bonne place avec ses trois façons de calculer le PIB.

Pour les tenants de la politique de l’offre l’INSEE va chiffrer, au prix du marché précédent, toutes les marchandises et tous les services vendus. Il va obtenir « en volume » le PIB par la « valeur ajoutée ». Comme c’est en volume on lui rajoutera les importations classées en ressources et on enlèvera les exportations classées en emplois.

Pour les tenants de la politique de la demande l’INSEE va chiffrer tout ce que les habitants du marché ont dépensé. Il va obtenir en monnaie le même PIB mais par la distribution. Comme on parle en monnaie, on va rajouter les exportations qui sont aussi une source de monnaie. L’INSEE écrit alors « le PIB est égal à la somme des emplois finals intérieurs de biens et de services (consommation finale effective, formation brute de capital fixe, variations de stocks), plus les exportations, moins les importations ».

L’INSEE mélange allègrement l’activité du marché et l’origine des marchandises vendues comme l’origine de l’argent dépensé. Si on parle du PIB en volume on rajoute les importations à l’activité du marché et on lui retranche les exportations. Si on parle du PIB en monnaie on fait l’inverse et on rajoute à l’activité du marché les exportations en soustrayant les importations. Comme le résultat est toujours le même PIB qui doit en plus être entendu comme une création de richesses, on arrive évidemment à une montagne d’incohérences que chacun peut aller vérifier sur le site de l’INSEE.

Détail amusant, comptabiliser les variations de stocks pose le même problème que l’import-export. Si l’INSEE parle du PIB en volume, une augmentation de stock augmente pour lui le PIB et une diminution de stock le diminue. Mais si l’INSEE parle du PIB en monnaie c’est une diminution de stock qui augmente pour lui le PIB et une augmentation du stock qui le diminue. Pour les stocks, l’INSEE, plutôt que de faire une deuxième fois les efforts de contorsionniste déployés pour l’import-export, a décidé de parler exclusivement de « variations de stocks » ce qui évite les affirmations contradictoires et laisse le lecteur se débrouiller pour savoir dans quel sens les stocks varient.

La seule façon de calculer sérieusement le PIB est la troisième façon qu’a l’INSEE de le calculer et qui est en même temps la plus simple mais la moins aguichante : faire la somme en monnaie de toutes les transactions du marché. Mais dans ce cas comment faire croire qu’il s’agit de création de richesses ?

En laissant croire par électoralisme ou par inconscience que le PIB est une création de richesses alors que ce n’est qu’un constat d’activité, voire d’agitation, les Politiques, les médias et les experts nous poussent tout naturellement à la double facilité de payer par l’emprunt, des marchandises et des services importés. Cela fait exactement le même PIB que si nous avions travaillé pour fabriquer et si nous avions aussi travaillé pour avoir de quoi acheter. L’emprunt et les importations s’envolent pour faire du PIB et une croissance que nous devrons payer deux fois, une fois à ceux qui fabriquent vraiment et une deuxième fois aux banques pour les rembourser d’un argent qu’elles ont créé ex nihilo.

Ce que les Politiques, les médias et les experts appellent la crise n’est qu’une façon de nous dire que cela ne peut pas durer. Mais qui va gagner ? La crise ou l’ineptocratie ? L’ineptocratie, inepte par définition, attend désespérément tout de la croissance en le répétant sur tous les médias et en s’entredéchirant pour savoir comment la faire revenir. Le combat est rude car c’est l’avenir des Politiques, des médias et des experts qui est en jeu. Sera-t-il aussi douillet que leur présent ? La crise leur susurre que non.

Le prêt à intérêt

L’économie n’est pas une science mais une pratique qui devrait être simple. Il s’agit de l’application concrète dans un groupe donné de ce qui fonde tout groupe cohérent : le don de soi et l’accueil de l’autre dans un but commun.

Les matérialismes du XXème siècle, élaborés au XIXème siècle sur une lecture trop rapide du siècle des Lumières, ont réduit l’économie à la tentative de chiffrer les échanges de biens et de services, à l’analyse des conséquences sans en chercher les causes. Nous nous y sommes perdus car on ne chiffre pas le don de soi ni l’accueil de l’autre. Une fois perdus, nous avons inventé la « science » économique qui n’est qu’idolâtrie du chiffrage de tout avec un langage volontairement incompréhensible pour ne plus en voir la puérilité et faire croire à son sérieux. Ce phénomène méprisant d’autoprotection par des langages abscons se propage d’ailleurs partout. Il permet de ne pas étudier le vrai problème qui est l’affadissement du don de soi et de l’accueil de l’autre qui se réduisent au cercle familial et aux amis proches.

Revenons à des choses simples et sérieuses. Dans une société normale il faut, par son travail, obtenir les biens et les services mis à disposition par le travail des autres. C’est le village des schtroumpfs. Chacun a besoin des autres et sait que les autres ont besoin de lui. La seule différence est que pour éviter les profiteurs, nous passons par l’argent et nous achetons les biens et les services avec la complication très bien analysée dans Le schtroumpf financier.

Le drame de notre société est que nos dirigeants pour garder le pouvoir ont appelé démocratie un système où il faut flatter le peuple pour qu’il vote bien, ce qui leur permet de se dire investis d’un pouvoir quasi divin tout en se hurlant républicains. Ils ont donc fait croire au peuple que le progrès permettait de mieux vivre en travaillant moins, ce qui n’est pas faux mais qui reste limité. Pour faire sauter cette limite qui empêche le peuple d’admirer ses élites, il fallait fournir au peuple des marchandises à vendre sans avoir à les fabriquer et lui procurer de l’argent sans le faire trop travailler pour qu’il puisse acheter. Pour les marchandises à vendre, les importations et la balance commerciale déficitaire ont tenté de remplacer le travail. Et pour fournir l’argent nécessaire pour acheter on a inventé le prêt à intérêt qui a remplacé l’historique prêt sur gage aux puissants. Le PIB qui mesure l’activité commerciale n’a jamais été une ressource bien qu’on continue à le présenter comme un produit mais il devient maintenant deux fois un emploi puisqu’il va falloir payer les marchandises importées et rembourser l’emprunt. Comme on a inventé le faux thermomètre du PIB qui appelle création de richesse ce qui n’est qu’activité commerciale, nous glissons vers l’activité facile d’acheter avec des prêts ce que nous importons. Plus nous faisons cela, plus nous faisons de croissance. Profitons tout de suite, l’avenir paiera. Comment ? On verra bien. Les suivants s’en occuperont.

On comprend mieux pourquoi toutes les sagesses condamnent intuitivement le prêt à intérêt comme elles auraient condamné, si elles l’avaient connu, le mondialisme qui, sous couvert d’universalité, impose à toutes les civilisations, la nôtre pourtant bien malade. Il est d’ailleurs intéressant de noter qu’en hébreu le mot nashak signifie à la fois le prêt à intérêt et la morsure.

Cet essentiel étant posé et les lecteurs de ce blog sachant que la monnaie est de l’énergie humaine stockée, nous pouvons regarder techniquement ce qui se passe.

L’homme ne pouvant stocker son énergie que par la procréation et par la fabrication d’objets pérennes appréciés par le groupe, l’intérêt qui n’est ni l’un ni l’autre, est de la fausse monnaie qui s’autodétruit par la hausse des prix et la dévaluation qui sont toutes deux payées par le peuple. L’intérêt est donc un impôt, ce qui le rend scandaleux s’il est privé. Au XXème siècle la dévaluation de 99,95 % du franc, entre le franc Poincaré de 1910 et ce qu’il est devenu au moment du passage à l’euro de 2002 à savoir la pièce de 20 centimes de franc, a fait payer par le peuple la puissance bancaire et son immobilier fabuleux. Le prêt à intérêt n’est pas scandaleux en soi mais comme c’est un impôt, seule une banque nationalisée devrait pouvoir le faire dans un but utile au groupe, utile à la nation.

Le problème s’est encore compliqué au dernier quart du 20ème siècle lorsque les monnaies n’ont plus été liées à l’or et que les banques ont pu créer de l’argent par la double écriture. Ce n’était plus seulement l’intérêt qui était de la fausse monnaie mais le prêt lui-même qui n’était qu’illusion.

Pour ne pas dire au peuple qu’il fallait se remettre au travail, les politiques ont favorisé de fait l’esclavage dans l’espace qu’est le mondialisme et l’esclavage dans le temps qu’est le prêt à intérêt tout en condamnant sans appel l’esclavage après l’avoir limité à la traite négrière. Ils ont appelé le résultat « la crise » en demandant de nouveaux efforts au peuple, ce qui est bien entendu obligatoire. Mais les efforts demandés ne sont pas des efforts de production que seul le protectionnisme pourrait expliquer. Ce sont des efforts pour sauver le système qui a créé les problèmes. Nous sommes dans cette fuite en avant pilotée par les mondes politique, financier et médiatique.
Pour réagir il faut comprendre, s’unir et agir. C’est le seul chemin si nous voulons vraiment éviter la guerre qui est l’autre chemin beaucoup plus classique de la résolution des problèmes.