Voler au Louvre les bijoux des familles royale et impériale émeut semble-t-il la Terre entière. Mais faire payer discrètement par le peuple un enrichissement personnel en milliards, est ce qui se passe sous nos yeux distraits depuis 1971. Si tout le monde ou presque sait bien aujourd’hui que les banques commerciales créent de la monnaie, peu de gens en comprennent précisément le mécanisme et les doubles bénéficiaires.
Il faut d’abord bien comprendre que cette création n’est possible que depuis que l’argent n’est plus limité. C’est le 15 août 1971 que Richard Nixon a déconnecté, soi-disant provisoirement, le dollar de l’or, richesse universellement reconnue, entraînant la même déconnection pour toutes les monnaies qui étaient liées au dollar par les accords de Bretton Woods de 1944. La monnaie n’étant plus limitée en quantité par sa garantie en or, l’inventivité humaine a trouvé comment rendre légale et indiscernable une monnaie qui au départ n’existe pas et ne vaut donc rien.
Tout commence comme un jeu d’enfants. Deux enfants qui joueraient à se dire qu’ils se doivent mutuellement un million et qui rêveraient de ce qu’ils en feraient. C’est exactement ce qui se passe. Par une double promesse la banque et un emprunteur se reconnaissent mutuellement se devoir la somme à emprunter. Il n’y a aucun argent engagé, juste les promesses de la banque et de l‘emprunteur de payer à l’autre la même somme. La banque ne met pas d’argent, elle crédite simplement le compte de l’emprunteur en l’équilibrant par une dette équivalente que l’emprunteur reconnaît lui devoir. La banque ne sort de l’argent que si l’emprunteur retire de l’argent à un distributeur, ce qui est généralement insignifiant. Il ne s’agit pour l’instant que de promesses et la cour de cassation confirme bien que mettre des fonds à disposition ne doit pas être pris au pied de la lettre et se réduit à la simple écriture d’un crédit sur le compte.
« L’obligation de la banque prêteuse consiste à créditer le comptede l’emprunteur du montant convenu, ce qui constitue la mise à disposition des fonds. ». (Cour de cassation, chambre commerciale, 24 novembre 1987, n° 86-17.944)
L’obligation de la banque n’est pas de mettre des fonds à disposition mais seulement d’écrire sur un compte qu’elle doit ces fonds. Cela constitue officiellement la mise à disposition de fonds qui sont pourtant inexistants. Ce n’est qu’une promesse de la banque comme l’emprunteur n’a pour le moment que promis de devoir la même quantité d’argent à la banque avec en plus des intérêts. Les deux promesses s’équilibrent dans les comptes.
C’est la transformation consensuelle de la promesse du débiteur en dette réelle qui transforme en même temps automatiquement la promesse de la banque en une dette réelle vis-à-vis du détenteur de la somme inscrite sur le compte, détenteur qui va varier par la circulation de cet argent nouvellement créé et sans valeur objective.
L’emprunteur ne sait pas, en faisant un chèque ou un virement, qu’il ne fait circuler qu’une dette de la banque pas plus que celui qui reçoit ce virement à son compte en banque, ou ce chèque qu’il dépose à sa banque. Comme cette nouvelle banque honore les retraits, les chèques et les virements de son client, c’est elle qui se retrouve la bénéficiaire de la reconnaissance de dette de la première banque. Jusque-là rien d’extraordinaire, juste des mouvements équilibrés !
Mais comme toutes les banques commerciales font la même chose depuis 1971, elles se retrouvent toutes avec des dettes vis-à-vis d’autres banques qui ne sont équilibrées que par les dettes des emprunteurs des différentes banques. Et en chambre de compensation quotidienne, les banques annulent entre elles leurs dettes réciproques. Le résultat est que les banques annulent entre elles leurs dettes et récupèrent pour elles l’argent de leurs clients qu’elles n’ont pas payé et ne paieront jamais.
C’est la déconnection du dollar de l’or qui a permis ce nouveau faux monnayage incompris mais légal où les banques, en s’y mettant à plusieurs, créent une monnaie sans valeur qu’elles prêtent et qui leur revient valorisée par le travail de l’emprunteur qui continue à croire que cet argent n’a servi qu’a payer sa voiture ou son logement. Il a pourtant servi aussi à enrichir la banque sans aucune raison entraînant bien évidemment la dévaluation de la monnaie et donc le paiement, par le peuple au travers de la hausse des prix, de cet enrichissement bancaire dissimulé. Inutile de dire qu’avec toute cette monnaie, le jeu, appelé produits dérivés, et la corruption appelée politique, battent leur plein dans toutes les banques.
Tant que ceci ne sera ni compris ni arrêté, des employés de banque intelligents pourront, comme ceux qui ont créé avec rien, Vanguard en 1974 et BlackRock en 1988, devenir multimilliardaires en appauvrissant simplement le peuple par les mille moyens de la dévaluation monétaire, conséquence automatique de sa création sans contrepartie.
Tout le cinéma ou le narratif de la croissance chiffrée par le PIB qui nous indiquerait notre création de richesses alors que le PIB ne compte et n’additionne que nos dépenses dans cette monnaie de plus en plus majoritairement fausse, montre l’état de corruption ou de déliquescence intellectuelle de nos élites. On cherche vainement l’exception.
Pour paraphraser Bossuet, Dieu se rit de ceux qui se plaignent des conséquences de ce dont ils se cachent eux-mêmes la cause parce qu’elle leur rend la vie apparemment facile.